Contrairement à l'idée d'être "une machine", nous sommes des êtres complexes capables de naviguer les défis physiques, psychiques et émotionnels grâce à une écoute attentive de nous-mêmes.
L’épisode du jour s’intitule, On n’est pas des machines.
Alors comment cette idée m’est venue ? Tout simplement, une réflexion assez personnelle lors de mon petit run de ce matin. Donc j’étais partie courir, ça c’était l’intention de départ, et puis très vite, au bout de quelques instants, j’ai senti la chaleur extérieure et aussi intérieure. J’ai senti le corps qui avait du mal à se mettre en route et le rythme cardiaque qui montait très vite. Et donc j’ai eu cette présence d’esprit de venir revisiter mon intention de départ et de me dire… Et si on transformait ça en course marche pour adapter les sensations du jour à l’objectif sportif ? Et tout de suite, psychologiquement, s’opère une sorte de glissement, c’est-à-dire plutôt que de se dire il va falloir que je tienne, il va falloir que j’y arrive, dans cette sensation d’être en lutte, il y a cette écoute qui me paraît vraiment très juste des sensations du corps et qui n’est pas non plus une écoute complaisante. Il ne s’agit pas de choisir la solution de facilité non plus. Mais il s’agit d’adapter son rythme à ce que l’esprit et ce que le corps demandent au moment, dans le moment.
Marcher pour mieux apprécier
Et donc j’ai fait quelque pas de temps à autre en marchant et ça a complètement transformé mon expérience. Je me suis retrouvée à regarder le paysage, à l’apprécier. Trouver que c’était même joyeux et drôle d’adapter son rythme aux reliefs. Sentir qu’on peut marcher quelques pas quand il y a des cailloux, quand il y a des marches, quand ça monte beaucoup. Même sur le plat de temps en temps, quand le corps s’est un peu emballé. On peut avoir de cette façon, une appréciation du mouvement qui n’est pas une appréciation purement dans la performance, purement dans la quantité, mais quelque chose de bien plus qualitatif.
Le moment présent
Tout ça m’a fait réfléchir à cette façon qu’on a de gérer nos vies comme si c’était des petites entreprises. Nos vies, nos corps et notre esprit, avec une sorte de programme libéral, dans le sens de capitaliste du terme, dans le sens de pousser toujours un peu plus à une performance, de se dire qu’on appréciera, ou le moment ne peut être apprécié que s’il contient une certaine quantité d’actions, de choses faites. Et du coup, on passe complètement à côté de la valeur du moment présent. et de la possibilité de se détendre avec les choses telles qu’elles sont et de penser que notre pratique sportive et quelque chose de linéaire et que plus on se pousse, plus on va s’améliorer, franchement, je pense que ça mène nulle part. C n’est absolument pas réaliste et en plus, complètement décollé de la vie telle qu’elle est. La vie, elle est pleine de reliefs. Il y a des moments de pic, il y a des moments de grand creux. Ça peut être au sein d’une semaine, au sein d’une journée, ou même au sein d’une heure où on sent ces vagues qui nous portent vers le haut ou un peu plus vers le bas. Et ça fait vraiment partie de notre vie sportive, de notre vie psychique, de notre vie humaine.
Ralentir
J’allais dire plus généralement que d’arriver à surfer ces moments-là, non pas pour être toujours en haut de la vague, mais pour apprendre aussi à glisser dans les moments de creux, à s’adapter à tous les reliefs finalement. Et cette métaphore de la course-marche, run-walk, comme on dit en anglais, cette capacité à arriver simplement à ralentir le rythme, à décider de marcher quand le relief devient un peu plus important ou un peu plus difficile à négocier, c’est quelque chose qu’on peut transposer dans tous les aspects de notre vie. C’est précieux de se souvenir de ça, que les choses n’ont pas à être difficiles, qu’on peut souffler, qu’on peut ralentir, qu’on peut ne pas être performant, et que dans ce lâcher prise, il y a quelque chose qui est profondément appréciable. Faire dépendre ça. sa valeur de sportif de notre réussite sur notre segment Strava par exemple. Et on oublie complètement que justement l’entraînement, l’entraînement du corps et cette capacité à rentrer dans la réalité du moment et à rentrer dans la complexité de notre être. Tout ça, ça met en relief, ou pour moi ça fait écho à beaucoup de choses que je vois en ce moment, notamment sur toute l’industrie du bien-être, qui voudrait réduire le bien-être à un certain nombre de paramètres, de choses à faire. Et si on fait check, check, check à la liste, on va se sentir beaucoup mieux. Alors que dans le bien-être, dans le sens vraiment premier du terme, le mot le plus important dedans, c’est être. Et que si on passe à côté de la façon dont on est là, maintenant, comment est-ce qu’on peut être bien, si on essaie déjà d’être différent de ce qu’on est ?
L’écoute
Donc ça commence par cette écoute, comme j’ai dit au départ, non complaisante. par cette écoute qui ne soit pas machinale, qui ne soit pas automatique, qui ne soit pas sans arrêt quantifiable ou évaluable par rapport à un certain nombre de critères, mais vraiment cette ouverture. à notre propre territoire, à notre propre relief intérieur, et à cette acceptation qui n’est pas une résignation, qui est simplement une façon de prendre la mesure de l’être pour pouvoir créer du bien être. Et que c’est à partir du moment où on est vraiment à l’écoute de son corps, à l’écoute de son esprit, à l’écoute de ses émotions, qu’on peut dégainer tous les outils dont on a besoin pour les adapter à notre expérience du moment présent. Donc il ne s’agit pas tellement de changer cette expérience, puisque ça on a très peu de contrôle dessus, comme ce matin j’avais très peu de contrôle sur la façon dont je me sentais, donc plutôt que de nier, de tomber dans un déni, non non je ne me sens pas comme ça, ou alors je me sens comme ça mais je vais faire comme si ce n’était pas là, ou je vais pousser au-delà de ça, prenons la mesure de l’expérience, l’expérience réelle, vraie, de ce moment-ci, Qu’est-ce que je peux faire ou comment est-ce que je peux être pour là-dedans trouver une satisfaction dans mon mouvement ? Et ça, ça se reflète aussi dans notre psychologie. Quand on est triste par exemple, plutôt que de nier cette tristesse ou faire semblant d’être gai, prendre la mesure de cette tristesse, ne pas s’enliser dedans et se dire à partir de ce pincement que je sens au cœur, comment est-ce que je peux être ? Comment est-ce que je peux m’ouvrir ? Comment est-ce que je peux continuer à entrer en relation avec moi-même et les autres sans nier cette expérience qui est intime et qui est vraie, qui est l’être.
On n’est pas des machines
Donc on n’est vraiment pas des machines. Et je n’ai jamais d’ailleurs compris cet encouragement qu’on entend souvent à propos de sportifs ou de sportives, quand on dit “Oh, elle c’est une machine” pour dire elle est très forte. Ce qu’on appelle aussi le mental, c’est cette capacité à nier la souffrance. Et honnêtement, je pense que ce n’est pas du tout ça. Un mental fort, comme on dit, c’est un mental capable d’accepter ce qui est là, et capable d’avoir confiance qu’on a les ressources pour naviguer cette expérience telle qu’elle est, plutôt que d’essayer de la changer ou de l’ignorer ou de passer à côté. Donc dans tous les petits moments de notre vie, comme mon run-walk de ce matin, il y a toujours beaucoup de nourriture spirituelle et je reste fascinée par les coïncidences et les parallèles qu’on peut faire entre les mouvements du corps, les mouvements de l’esprit, les mouvements des émotions et notre rapport au monde. Merci de m’avoir écouté et à très vite pour un nouveau petit podcast.